1er Forum départemental de la jeunesse et de l’engagement

« La première fois que je prenais la parole et qu’on me demandait mon avis »

En mai dernier, près de 400 jeunes se sont réunis à La Maison, à Nevers, pour le premier Forum de la jeunesse et de l’engagement, organisé par le Conseil départemental.
Table ronde, ateliers et spectacles ont créé des espaces de dialogue qui ont fait émerger des attentes, des besoins et des émotions mêlées.

Je me suis rendu compte de la violence constante que subissent les jeunes. Elle se diffuse de génération en génération, et doit être entendue. La violence est plurielle, elle se caractérise par des atteintes physiques, morales ou sexuelles. Elle se propage autant dans le domaine scolaire que professionnel. Elle se répand également dans l’univers familial et fragilise la jeunesse qui se construit. Les moments passés lors de ce Forum de la jeunesse et de l’engagement ont donc été forts en émotions.
Tristesse, désarroi, colère, impuissance…
Ce sont tous les mots qui m’ont traversé l’esprit lorsque je me suis rendue aux différents ateliers ou spectacles.
La jeunesse est ignorée, précaire et donc dans le besoin d’être rassurée et écoutée. Force est de constater que cette journée était attendue et pleine de revendications de la part de toute une génération qui ne trouve pas sa place dans le monde actuel. Et si on leur accordait au moins un temps d’écoute ainsi qu’une tribune d’expression

La force du théâtre immersif

C’est dans le cadre de ses interventions au lycée Raoul-Follereau (Nevers) que Camille Delpech, metteuse en scène de la compagnie Les Ballons rouges, a créé pour le Forum un spectacle de théâtre immersif « qui donne la voix aux lycéens de la Nièvre ». La pièce est divisée en deux parties ; il y a d’un côté la restitution des ateliers d’écriture Je suis la Nièvre, un travail sur l’écrit et l’oral, et de l’autre côté le projet Je suis l’Europe, un théâtre très engagé pour la jeunesse.
L’ensemble est plein d’espoir mais il dresse aussi le portrait d’une jeunesse angoissée. Nous sommes plongés dans les portraits décrits par les lycéens. Dans le hall de La Maison, les jeunes parlent, crient et interviennent tour à tour sans qu’on sache que ce sont en fait les comédiens. Ils se mettent à notre niveau et nous apostrophent pour témoigner, dire leur colère. Je suis la Nièvre devient alors une tribune pour dénoncer et se confier.
Pauline, 18 ans, a enfin pu poser des mots sur ce qu’elle ressentait : « C’était la première fois que je prenais la parole et qu’on me demandait mon avis. » Mattias, 17 ans, a évoqué dans un plaidoyer touchant le suicide d’un jeune agriculteur obligé de se surendetter. Ce drame évoque, de façon sous-jacente, la solitude en milieu rural : « Je me suis intéressé et je suis rentré dans le rôle de ce personnage, car je vis loin de tout, dans un petit village esseulé. » Manon, 15 ans, espère être écoutée : « On me donne l’opportunité, lors de ce Forum, de dire que les violences et les émotions qu’on subit sont bien réelles et à prendre au sérieux. C’est pas parce que l’on est adolescents que l’on souffre, c’est parce que l’on vit des choses douloureuses. »

Regards sur le colonialisme

Les visiteurs du Forum ont découvert l’exposition sur le colonialisme réalisée par des jeunes de Vaulx-en-Velin, près de Lyon. Toutes les informations collectées permettent aussi de se rendre compte des violences subies au temps de l’esclavage et des colonies. Comme Saartjie Baartman, surnommée la Vénus hottentote, femme née esclave en 1788 en Afrique du Sud et exposée en 1814 en France. Elle a été exploitée et prostituée et choisie par sa morphologie dite hors normes.
L’erreur du passé permet d’une certaine façon de se rendre compte d’où viennent certaines violences. Le racisme et le harcèlement prennent leurs racines dans ces histoires singulières et montrent que les conditions du vivre ensemble doivent être continuellement travaillées.
« Se retrouver dans la conception d’un tel projet lorsque l’on a entre 20 et 27 ans, c’est vraiment très formateur », explique Victoria Molina, qui a participé à la création de l’exposition. « J’étais en service civique dans l’espace de projets inter-associatif qui lutte contre les discriminations et qui aide les autres associations à aller au bout de leurs projets. J’ai compris comment, dans l’Histoire, s’est construit l’imaginaire collectif et de quelles manières nous nous sommes développés avec la différence.
C’est incroyable de se dire que l’humain était exposé comme un animal. On venait le voir dans les zoos humains comme si c’était une bête. Les expositions coloniales ont fait plus de 3 millions de visiteurs, certains hommes étaient vus comme des sauvages. Le point de départ de tout ça, c’est le racisme, et il est encore trop présent aujourd’hui. »

Libérer la parole sur le harcèlement

Plusieurs jeunes se sont confiés avec timidité sur leurs expériences de harcèlement suite à la diffusion d’un film sensible et plein de lucidité réalisé par les jeunes du Centre social de Lormes. Les souffrances sont semblables, le parcours pour s’en remettre similaire et les blessures sont bien réelles.
L’écoute bienveillante et le parcours de vie de Latifa Chay, autrice du livre Sois une femme ma fille et elle-même victime de harcèlement, ont résonné dans les esprits avec un modèle de combat pour s’en sortir. Geneviève Garrigos, militante des droits humains, a mené un atelier où beaucoup de violences physiques et sexuelles ont été
relatées. Les témoignages sont difficiles et montrent la difficulté de la prise en charge. Les viols n’ont pas de limites d’âge ni de genres ; les traumatismes entravent les parcours de vie des victimes et elles doivent être prises au sérieux. Cette génération a besoin d’être entendue sans être obligée de rester dans le silence.

Le Forum Départemental, la Compagnie Les Ballons Rouges. Crédit photo : Aît Belkacem

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